Posté par neLendirekt,
Présentation des nouvelles ligues BLAST, ESL Pro League et la ligue américaine appartenant aux équipes, B Site. Nous posons également la question du pourquoi de ces ligues et de l'évolution de la scène.
Depuis quelques jours, la scène s'affole après les diverses annonces concernant les compétitions qui animeront l'année 2020 sur Counter-Strike. La concurrence s'est accentuée et les enjeux deviennent colossaux alors que l'avenir de CS, ou du moins du CS que nous connaissons depuis des années, pourrait être remis en question. Nous allons tâcher de vous expliquer pourquoi des ligues apparaissent et quels sont les enjeux.

Pourquoi des ligues ?



Depuis le début de CS:GO et même de CS en général, la compétition a toujours été propulsée par des organisateurs indépendants et non par l'éditeur du jeu, Valve. Même les Majors ne sont pas organisés par Valve mais avec le soutien et le support financier de la firme de Seattle. La nuance est importante. Ce sont donc ESL, DreamHack, StarSeries, FACEIT, ELEAGUE, BLAST, PGL, MLG, Gfinity et bien d'autres qui organisent et financent les tournois de la scène CS depuis des années.

Ce modèle est assez unique pour un jeu d'une telle popularité. Les autres titres majeurs comme LoL, Dota, OverWatch, PUBG ou même Fortnite voient le tournoi majeur de chaque jeu organisé et financé entièrement par l'éditeur. Parfois c'est même tout un circuit qui est organisé par le créateur du jeu, dans d'autres cas le circuit est même totalement fermé aux organisations extérieures. Ce format donne donc beaucoup de pouvoir aux organisateurs (appelés TO) sur CS:GO mais l'absence d'investissements de l'éditeur soulève auprès des acteurs du jeu d'inquiétantes interrogations autour d'un modèle économique viable. Dan Fiden, le président de Cloud9 a déclaré perdre plusieurs millions chaque année. Partenaires frileux, ligues peu rémunératrices, la quasi-intégralité des gains laissés aux joueurs et l'absence d'items aux couleurs des équipes directement dans le jeu et générateurs de revenus (comme les skins équipes de R6, Rocket League ou LoL) sont des arguments qui suscitent l'inquiétude chez les patrons d'écuries.

Si Valve ne s'impose pas comme organisateur de l'événement principal de CS, pourquoi chaque organisateur ne tenterait pas sa chance de créer le circuit ou la compétition parfaite ? Voici une première raison de la création des ligues. Ensuite, le fameux eco-système de CS est souvent remis en question, comme le CEO de Vitality Nicolas Maurer l'a précisé dans une emission du Warmup de l'été dernier. (ci-dessous, rendez-vous à 33:10)



En résumé, dans l'esport mais surtout sur CS les structures investissent à perte pour avoir leur nom présent sur un jeu major de l'esport (vous êtes probablement déjà tombés sur une annonce de levée de fonds). Aujourd'hui, il n'y a aucun réel retour sur investissement financier sur le moyen/long terme avec le système actuel. Le modèle de franchises se rapprochant des ligues de sports traditionnels américains comme sur LoL/Overwatch permet une pérennisation des investissements, même si il ne garantit pas actuellement une rentabilité. Ce modèle fermé n'est pas compatible avec l'esprit de CS et son histoire.

BLAST et ESL notamment ont essayé d'imposer une stucture de ligue fermée, exclusive, mais Valve est vite intervenu pour empêcher tout blocage du circuit par un organisateur. Il leur faut donc trouver un modèle hybride permettant aux grosses organisations d'avoir une sécurité pour leurs investissements mais aussi laisser une ouverture pour les autres équipes qui se créent ou progressent jusqu'au top de CS.

A l'heure actuelle, BLAST, ESL et la nouvelle ligue américaine B Site proposent chacun des philosophies différentes.



BLAST Premier : le début des choses sérieuses



C'est le premier circuit de l'année qui donne le coup d'envoi d'un calendrier 2020 proche de la saturation. Bien qu'aujourd'hui complétement accepté par la scène et devenu un acteur majeur, BLAST a tout de même connu des moments compliqués.

En début 2019, BLAST et Astralis ont été longuement critiqués puisque l'équipe danoise ne participait qu'aux tournois BLAST en refusant les autres compétitions plus prestigieuses et importantes. La raison repose sur le fait que les tournois BLAST étaient plus rapides et reposants pour des Danois qui avaient besoin d'une pause. Il est important de noter qu'à l'époque, Astralis et BLAST étaient tous les deux la propriété de la même entreprise, RFRSH. Un conflit d'intérêts évident pouvait être souligné et beaucoup ont mis en avant cette "privatisation" de la meilleure équipe du monde. Une période baptisée BLASTRALIS.

De nombreuses critiques ont également touché BLAST à cause du format, jugé peu intéréssant par bon nombre de fans et de leur récurrence dans le calendrier "seulement" pour des compétitions en BO1. Les finales s'étant déroulées à Bahreïn ont également été sous le feu des critiques de la communauté.



Après avoir essuyé les plâtres, BLAST a été le premier à dégainer sa ligue : les BLAST Premier. Douze formations ont été invitées : Vitality, G2, Astralis, Liquid, EG, Na'Vi, FaZe, MIBR, 100Thieves, NiP, OG et Complexity. Les non-invitations de fnatic et mouz, à l'époque #2 et #4 au classement HLTV ont fait grand bruit. Les présences d'OG et de complexity, qui n'ont aucune référence esportive, mais une certaine puissance médiatique et financière, autour d'un projet ambitieux, expriment la volonté d'intégrer au circuit des grandes "fanbases" au détriment d'équipes plus performantes.

Le circuit se développe en 3 temps sur 2020 : Spring season, Fall season et les Finales globales. Chaque saison voit les 12 équipes invitées s'affronter dans trois groupes de quatre, les deux premiers de chaque groupe se qualifient pour les finales de la saison. Les deux dernières places seront ouvertes aux six équipes qui n'ont pas passé la phase de groupes et quatre formations arrivant de qualifiers (ndlr: non confirmé pour le moment). Le top 8 s'affronte aux finales de la saison. (format expliqué dans le tweet ci-dessous)

En toute fin d'année des finales globales regroupant les meilleures formations des deux saisons et donc de l'année CS globale offriront 1 million de dollars de cash au vainqueur. En résumé, sur l'année ce sont 4 250 000 $ qui seront offerts par BLAST, 1 375 000 $ par saison et des finales à 1 500 000 $.

Avec une annonce du circuit en septembre 2019 et des équipes validées fin 2019, BLAST a réservé ses dates bien en amont et frappé un grand coup sur la scène. Leur format est clair, le cash est incroyable, les équipes sont les meilleures mondiales (à l'exception de fnatic et mousesports) et une petite porte est offerte pour le reste des équipes non invitées via des tournois de qualification. Un modèle semi-ouvert donc, en tout cas pour 2020. Aucun détail n'a fuité concernant l'année prochaine ou même la saison Fall et des éventuelles évolutions selon les résultats, à l'image des EPL qui a toujours eu un système de promotion/relégation.

Les BLAST Premier débutent cette semaine sur 1pv.





ESL Pro League : l'historique qui doit réagir



Organisateur historique, ESL est présent sur CS depuis plus de 15 ans avec entre autre les historiques IEM, ESL One et Pro League. Cette compétition est la ligue phare de l'ESL depuis maintenant 5 ans et rentre dans sa 11ème saison.

A l'origine, le système était basé sur des championnats online en Europe et en Amérique puis la saison 7 a vu une ouverture vers l'Asie, l'Océanie et l'Amérique du Sud. A partir de la saison 9 en 2019, le championnat online jugé trop long et fastidieux (et rejeté par les joueurs voulant réduire le nombre de matchs) est devenu un événement offline avec des groupes, un format beaucoup plus moderne. Ce sont en tout près de 48 équipes à travers le monde qui ont pris part à la dernière saison en date, la dixième.

A l'aube de la saison 11, tout ce système vole en éclat avec une nouvelle formule qui écarte tout simplement la moitié des équipes. Terminé le format régional, place à un tournoi global avec 24 équipes. Toutes les équipes ayant participé aux dernières finales EPL sont directement qualifiées, 8 sont invitées et 2 viennent de MDL EU et NA. MIBR et Cloud9 ont refusé de participer.



Autrement dit, cette décision écarte totalement les scènes plus faibles (Asie, Océanie) et met de côté encore quelques équipes qui pouvaient se qualifer pour les EPL via le tournoi de relegation. De nombreuses formations n'avaient que ce tournoi pour se mettre en avant et ce changement modifie totalement leur dynamique, coupant une scène "Tier 2" mondiale d'une chance de faire face à du Tier 1 et se faire un nom.

La forme est également à déplorer avec l'absence totale de communication avec les équipes concernées qui ont tout simplement été écartées sans avoir été prévenues au préalable. Encore une fois, ce système fait un peu penser à un format de ligue semi-fermée où les plus gros noms sont protégés. En signant avec ESL, les équipes s'engagent sur un partenariat long terme qui pourrait les protéger de toute relégation. L'une des motivations principales des équipes partenaires est l'intéressement aux revenus et profits générés par la ligue (certains chiffres évoquent 21% du Chiffre d'affaires et 60% des profits en 2020). Certaines écuries évoquées n'ont à ce jour pas encore confirmées leur présence.



ESL a réagit en s'excusant du fond et de la forme et promet de se racheter pour la saison 12 et permettre aux équipes flouées de retenter leur chance. L'association des joueurs pros de CS, le CSPPA, a condamné le choix d'ESL d'écarter autant d'équipes et la mauvaise communication tout en expliquant qu'elle ne pouvait pas intervenir. De quoi se poser des questions sur la réelle utilité de cette association alors que les joueurs membres participent à ces ligues.

La polémique autour d'ESL avait déjà commencé avec une fuite du brouillon de l'accord de l'ESL Pro League avec les organisations: le Lanxess Agreement. Ce contrat qui n'était qu'un brouillon met en avant la recherche de l'exclusivité, de mise en avant de son propre ranking (au lieu de celui d'HLTV), une liste d'équipes prioritaires ou encore d'une durée de l'accord de 4 à 6 ans selon les sources. De nombreux autres détails comme la répartition des revenus, de certaines conditions pour avoir sa part du revenu lié à la participation d'événements ESL, etc. sont disponibles en détail dans l'article et le document.

Même s'il apparait que ce contrat va et a été modifié depuis, le signer bloquerait de nombreuses organisations dans les EPL alors que d'autres ligues essayent de se créer pour attirer les meilleures équipes. Si BLAST a bien joué son coup en se préparant à l'avance, ESL se retrouve maintenant face à B Site qui devrait se jouer en même temps que les EPL.

Le format des EPL est déjà connu avec quatre groupes de six équipes, les premiers s'affrontent ensuite pour des places en quarts et en demies quand les 2èmes et 3èmes passent dans un arbre qui commence dès les 16èmes de finale.



B site : le petit dernier qui pourrait changer la donne



B site est une nouvelle ligue, aux USA, dont peu de détails sont connus pour le moment. Il apparait que C9 et MIBR sont les organisations ayant lancé ce projet, ce qui explique notamment leur non participation aux EPL. Nous savons pour l'instant que la ligue est opérée par FACEIT et prendra la suite des ECS qui disparaissent. L'analyste bien connu Duncan "Thorin" Shields est directeur de création et semble avoir une place de choix dans les décisions prises par la ligue.

Les premières informations ayant fuité annoncent un prix d'entrée de 2 millions de dollars pour participer en échange l'équipe devient actionnaire et sera intéressée aux revenus générés. Selon ESPN, Cloud9, Gen.G, Dignitas, MiBR, MAD Lions et c0ntact (ex-CR4ZY) sont les premières équipes ayant payé le droit d'entrée. Autrement dit uniquement des équipes appartenant à des organisations américaines. Un maximum de 12 équipes est prévu pour cette première saison avec des qualifications onlines. Les deux qualifiés n'auront pas à payer de droits d'entrée. Les équipes actionnaires sont protégées d'une relégation.



Thorin et Semmler sont pour l'heure les seules personnes qui communiquent officiellement sur la ligue B Site qui devrait se dérouler à Los Angeles en même temps que les EPL. Ils ont notamment précisé que la compétition aurait deux saisons en 2020, durerait entre 5 et 6 semaines par saison. Des amendes en cas de mauvaises performances pourraient être infligées.

Pour l'heure, seulement les talents ont été annoncés officiellement et nous pouvons noter la présence de quelques uns des plus gros noms de la scène comme Anders, Semmler, Moses, ddk, James Bardolph ou encore Sean Gares. Ces derniers ne devraient donc pas participer aux EPL. Si B site possède pour l'instant les talents anglophones les plus populaires, il apparait que la ligue se présente comme un tournoi Tier 2 étant donné la faiblesse des équipes présentes. Ce projet de ligue semi-fermée appartenant aux équipes est tout nouveau et ressemble aux standards du modèle de franchises nord-américaines. La révolution est-elle en marche ?

Nous devrions avoir plus de détails le 5 février prochain lors d'une conférence de presse qui présentera la ligue, les équipes, le format et les détails de qualification.




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